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INTERWIEW DE JULIEN DELAGRANDANNE – AUTEUR DE « L’INVESTISSEMENT LOCATIF INTELLIGENT »

Ce blog se focalise sur l’investissement passif, notamment grâce aux ETF. En effet, je considère qu’il a un rapport performance/risque/temps passé extrêmement performant. Mais l’objectif de ce blog est aussi de diffuser tout le savoir permettant d’optimiser la gestion de son patrimoine.

L’immobilier est clairement un sujet important. Julien Delagrandanne vient de publier «L’investissement immobilier locatif intelligent: Itinéraire vers votre future semaine des 7 dimanches », qui marche déjà très fort sur Amazon. Il s’agit d’un livre qui donne de nombreuses informations très utiles, et qui est responsable dans le sens où il parle de l’intérêt de l’immobilier, mais aussi des risques. Il me paraissait naturel de l’interviewer.

  1. Table des matières masquer

    Bonjour Julien, peux-tu nous parler de ton parcours d’investisseur ? Depuis quand investis-tu en bourse et en immobilier ?

J’ai toujours été attiré par ce qu’était lié à l’investissement. Dès 12-13 ans, j’avais convaincu ma grand-mère de m’emmener au bureau de Poste de ma commune rurale pour acheter ma 1ère action (une action Teisseire !) avec mon argent de poche. Je me souviens que ça avait été assez épique pour que la receveuse arrive à passer l’ordre. À 16 ans, en me promenant,  j’avais repéré par hasard un bien neuf (fini de construire) en vente, issu d’un promoteur qui venait de faire faillite : il était bradé pour être vendu vite… bradé par rapport aux prix du marché de 1996 qui étaient eux-mêmes le creux du marché ! Et j’ai fini par convaincre mon père que ce n’était vraiment pas cher d’investir : en euros courants, il a été multiplié par 4 depuis (même si Nassim Taleb verrait peut-être une part de chance là-dedans et il n’aurait pas forcément tort). Déjà, on voit mon adhésion à la philosophie d’investissement  value qui germait, puisque je lui avais avancé comme raison d’investir « ce n’est vraiment pas cher » (sous-entendu, regard vers le bas : on ne risque pas grand-chose et on verra bien) plutôt que « ça va monter » (regard vers le haut).

C’est comme ça que tout a commencé. Ensuite, j’ai vite touché expérimentalement à tout à ce que je pouvais avec des moyens modestes d’étudiant. Mais c’est l’expansion d’Internet qui m’a permis d’apprendre à investir correctement à partir du milieu de la décennie 2000, car c’est grâce à ça que j’ai pu savoir comment je devais me former, avec quels livres etc. Avant, j’étais autodidacte, mais je n’avais pas de mentor pour me diriger vers les bonnes lectures, m’expliquer qui était Warren Buffet, ou encore pour m’apprendre à séparer le bon grain de l’ivraie… Et j’ai donc comme tout le monde fait quelques erreurs de débutant.

Pour résumer, j’ai plutôt une philosophie d’investissement type « bon sens paysan » due probablement à mes racines rurales, et j’ai la particularité de ne pas être monomaniaque, mais de bien toucher  aux 3 piliers de l’enrichissement :

  • La bourse.
  • L’immobilier.
  • Dans une moindre mesure l’entrepreneuriat, puisque je classe dans cette case mon blog et l’écriture de mes livres.
  1. Et de ton parcours en tant qu’auteur ? Tu es déjà à ton troisième livre !

Pourtant à la base scientifique (formation d’ingénieur), j’ai certaines facilités rédactionnelles, et mon esprit de synthèse m’aide à être assez pédagogue et à conceptualiser des sujets complexes.

  • J’ai écrit « Construisez et gérez votre patrimoine avec succès » en 2012 à un moment où j’avais besoin de synthétiser ce que j’avais appris sur la gestion de patrimoine, de mettre de l’ordre dans les idées en quelque sorte. Ce travail était donc également effectué pour moi, mais tant qu’à faire j’ai essayé de le partager et ça a donné ce premier livre.
  • Pour « Investir en bourse : styles gagnants, styles perdants », contrairement au premier c’est le titre qui m’est apparu en premier plutôt que le contenu, lors de l’une de mes promenades « philosophiques » solitaires. Je l’ai écrit un an après le 1er en essayant de montrer ce qui fonctionnait ou pas en bourse et pourquoi, sachant qu’on est ici plutôt dans le cadre d’un style d’investissement actif.
  • Enfin, plusieurs années après (fin 2017), j’ai publié L’investissement immobilier locatif intelligent. J’avais commencé à investir plusieurs années plus tôt en immobilier, mais j’estime que pour partager son expérience il faut avoir un peu de recul. À mon sens, ce n’est pas 2 ans après un premier investissement immobilier que l’on peut se permettre de donner des conseils, car on n’a pas encore subi les éventuels problèmes qui peuvent apparaître au fil du temps.
  1. Focalisons-nous sur l’immobilier. Est-ce que tu penses que c’est un complément indispensable à l’investissement financier, notamment en bourse ?

Pour moi, si on parle hors levier du crédit, l’investissement en bourse est intrinsèquement supérieur à l’immobilier : qualité des business sous-jacents qui peuvent avoir des avantages concurrentiels et s’adapter, frais à l’achat moindre (incomparativement moindres même quand on pense frais de notaire et d’agence vs frais d’un ETF !), fiscalité favorable du PEA, ticket d’entrée moins élevé, etc.

Mais le problème de la bourse, comme d’ailleurs très bien expliqué dans le livre The Millionnaire Fastlane dont je viens de terminer la lecture, c’est que l’effet des intérêts composés (ou la possibilité d’en tirer des revenus passifs suffisants) ne se fait vraiment ressentir que quand tu as un certain capital, et donc – si tu es salarié – en général quand tu as déjà atteint un certain âge.

Hors cas particulier de l’héritage, pour atténuer l’effet de ce temps qui joue contre toi, tu as deux solutions :

  • Entreprendre pour avoir un capital élevé tout en étant encore jeune (issu de la revente de ta boîte ou des flux que tu en tires).
  • Ou investir dans l’immobilier le plus jeune possible à crédit, puisque c’est le seul placement qui te permet d’investir de l’argent qui n’est pas le tien, tout en l’empruntant dans des conditions favorables (crédit long et à taux fixe sans appel de marge). Investir dans l’immobilier est d’ailleurs en quelque sorte une façon accessible au plus grand nombre d’entreprendre. Je veux dire par là qu’il suffit d’avoir une certaine solvabilité, sans avoir besoin de véritables idées novatrices d’entrepreneur, pour que ce soit à ta portée.

Je dirais donc que la bourse et l’immobilier sont complémentaires. D’ailleurs, pour ma part, je regrette de ne pas avoir compris cela dès le moment j’ai débuté la gestion de mon patrimoine et donc d’avoir commencé à investir dans l’immobilier encore plus jeune. Dans une optique de quête d’indépendance financière, le mieux est même à mon sens d’associer les 3 piliers : bourse, immobilier, et entrepreneuriat.

  1. Mais quid de la rentabilité ? On entend souvent dire que l’immobilier est à son plus haut et notamment complètement déconnecté des revenus des Français ?

Oui et non. C’est vrai à Paris, et dans quelques grandes métropoles comme Bordeaux qui ont particulièrement flambé.

Si tu regardes en revanche l’indice des prix moyens en Province, tu verras que les prix sont quasiment au même niveau qu’en 2005. Alors que les taux d’intérêt étaient beaucoup moins favorables à l’époque.

En immobilier, tu vas gagner de l’argent sur la différence entre ton rendement locatif et le taux d’intérêt auquel tu empruntes. En trouvant un bien dont le prix a peu monté depuis 10 ans, avec en parallèle un taux d’emprunt qui a quant à lui été divisé par 3, la conclusion est assez mathématique : on peut encore faire des affaires intéressantes. D’autant qu’il n’y a pas besoin d’aller dans une zone sinistrée, des villes moyennes assez dynamiques présentent de telles caractéristiques. Ou bien, dans certaines métropoles, tu peux faire le choix d’une commune dynamique de la communauté d’agglomération plutôt que le centre-ville, etc.

  1. Dans ton livre, tu parles de « rendement entrepreneurial », c’est un concept que je trouve extrêmement intéressant. Est-ce que tu peux nous expliquer ?

J’ai emprunté ce concept à Piketty et l’ai appliqué à l’immobilier. En résumé, Piketty explique que dans l’histoire « longue », les investissements ont en moyenne rapporté 5% de rendement. Au point qu’au XIXe siècle, période d’inflation très faible, pour exprimer le montant d’un patrimoine, on retrouve dans les livres de Balzac indifféremment les expressions « un patrimoine de x » « ou une rente de y » (avec y=x*5%). Ce qui veut dire que tout point de rendement qui dépasse ces 5% cache un travail de l’investisseur qui va au-delà du simple placement d’argent, c’est « le rendement entrepreneurial ».

En immobilier, si on se contente d’acheter le marché ou le premier appartement que vous proposera une agence, on va souvent ne pas faire mieux que ces 5%. Pour faire mieux, il faut aller un peu plus loin. Sans rentrer dans le détail ici, schématiquement ce travail supplémentaire peut être intellectuel (plusieurs facteurs d’optimisation) ou manuel (travaux, effectués soi-même ou délégués à des artisans).

  1. C’est ce qui explique qu’il vaut mieux investir dans un bien près de chez soi.

Cela peut aider pour certains aspects du rendement entrepreneurial. Mais je dirais que c’est encore plus pour d’autres aspects de l’investissement locatif, où la réactivité et la connaissance de son marché comptent, que le faire près de chez soi procure des avantages à l’investisseur.

  1. J’en conclus que si l’on est un parisien qui n’a pas le temps de s’occuper de son bien, l’immobilier locatif est probablement une mauvaise affaire. En revanche, si on est un provincial qui apprécie le bricolage, c’est probablement un excellent investissement.

Un Parisien peut avoir des opportunités. Il y a des villes de province ou de banlieue à portée de tir de Paris. Il peut avoir de la famille restée dans sa région natale. En revanche, je déconseillerai effectivement à un Parisien d’investir à Perpignan, s’il n’a pas d’attaches là-bas.

Sur le fait d’apprécier le bricolage, moi-même je ne suis pas très doué en bricolage ! Les travaux peuvent se déléguer à partir du moment où l’on n’est pas trop limite en revenus / possibilité de financement (je le conseille même dans ce cas). Mais c’est vrai qu’il faut quand même être en capacité de dégager  un peu de temps pour se former, et qu’il faut consacrer du temps au suivi de ses 1ers projets pour éviter des erreurs coûteuses.

  1. Tiens j’en profite pour te poser la question que tout le monde se pose. Et la résidence principale qu’en penses-tu ?

Pour ma part, je suis propriétaire de ma RP. Mais j’avais commencé l’investissement locatif avant d’acquérir celle-ci, donc je suis la preuve que tout est envisageable, même le moins logique d’apparence…

Cela dépend en fait de pas mal de facteurs : les caractéristiques du marché immobilier là où on vit, si on compte y rester longtemps, si on était obligé de revendre ou si on peut la transformer en investissement locatif dans le cas on déménagerait, etc.  Je l’analyse comme un investissement locatif avec des paramètres plus favorables (pas de fiscalité sur les loyers fictifs, pas de risque de vacance locative, ou d’impayés…). Donc du coup, je recommande de se poser la question de l’intérêt de l’achat de sa résidence principale avec des critères du même type de ceux utilisés pour un investissement locatif, mais en étant un peu moins exigeant / sévère sur ces critères.

  1. Et l’immobilier défiscalisant (PINEL, etc.) ?

Sauf à réaliser son investissement soi-même (acheter un terrain puis y faire construire une maison), ce n’est en général pas intéressant.

L’hypothèse d’une revente au prix d’achat dans une dizaine année prise systématiquement par les promoteurs dans leur argumentaire commercial est trop optimiste et fausse leurs simulations. Il suffit de regarder le prix d’appartements anciens (même construit il y a moins d’une quinzaine d’années) dans le même quartier et les comparer au prix du neuf pour s’en rendre compte.

  1. Et les SCPI (Sociétés Civiles de Placement Immobilier) ?

Sauf cas particulier, je n’y investirai pas aujourd’hui. Au-delà de la fiscalité peu optimisable quand on est déjà pas mal imposé, il y a quelques craintes actuellement sur les bureaux et murs de magasins : développement du télétravail, concurrence du e-commerce. D’ailleurs, quand on lit en détail les rapports d’activité des SCPI (même des très bonnes), on constate qu’actuellement elles sont obligées de concéder des baisses de loyer à la relocation.

  1. Tu parles de plein d’autres choses dans ton livre, et l’objectif n’est pas de la résumer en une dizaine de questions. Qu’as-tu envie de dire au lecteur de mes livres, de ce blog ?

Tes lecteurs m’ont l’air ouverts d’esprit. S’ils sont intéressés par l’immobilier, je pense qu’ils sauront aller faire un tour sur mon blog ou voir ce qu’on dit du livre sur Amazon.

  1. Et tes lecteurs, on peut voir que les avis sur Amazon sont extrêmement élogieux. Qu’ont-ils apprécié dans ton livre ?

Si je synthétise les retours positifs au sujet du livre, il y a 3 axes qui ressortent :

  • Le livre ne donne pas une fausse impression de facilité et ne se contente de formules de motivation toutes faites du type « quand on veut on peut » mais évoque aussi les difficultés et embûches que l’on peut rencontrer dans l’immobilier locatif.
  • La fiscalité est abordée. Même si elle est particulièrement changeante en France (c’est probablement pour cela que beaucoup d’auteurs choisissent de ne pas en parler),  je pense que c’est un moyen essentiel pour bien optimiser un investissement locatif, et j’ai donc choisi d’y consacrer une partie du livre.
  • Chaque concept théorique présenté est illustré d’exemples concrets issus de ma propre expérience d’investisseur.
  1. Que peut-on te souhaiter pour l’année 2018 ?

Je ne sais pas trop. Que le succès actuel de mon dernier livre se prolonge sur l’année par exemple !

J’ai quelques autres idées de projets qui germent (sur le blog entre autres), mais il est un encore peu tôt pour en parler.

De son côté, Julien m’a interviewé sur son blog ici. Il parle sur ce blog de bourse, d’immobilier et entrepreneuriat… en autre. N’hésitez pas à aller y faire un tour.

Je remets un lien Amazon vers le livre sur l’immobilier “L’investissement immobilier locatif intelligent”.

Pratiquement 300 commentaires et une note moyenne de 4,8/5 ! N’hésitez pas à aller lire les avis afin de vous faire une idée.

24 euros en version papier et 10 euros en Kindle …

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4 commentaires

  1. christophe dit :

    Bonjour Edouard,
    Je suis depuis quelques mois votre Blog qui m’a fait découvrir les ETF, je vous en remercie, mais une interrogation majeure demeure, comment vous rémunérez-vous?
    Je m’explique, les ETF étant des suiveurs d’indices, et ceux ci étant cycliquement, en haut ou en bas (a un moment donné) si ce ne sont pas des ETF distributeurs de dividendes, il y a donc un travail d’arbitrage permanent pour en tirer des bénéfices?

    1. Bonjour Christophe,
      on y gagne car la bourse monte a long terme (elle n’est pas que cyclique) et il y a quelques arbitrages (que l’on appelle rebalancing ici plutôt).

  2. Bonjour,

    Merci pour cet article. Ne pensez-vous pas que l’investissement immobilier est bien moins risqué que l’investissement boursier. La stratégie ETF 3.0 est très illiquide au fond car elle repose sur une espérance de gain long-terme en se basant sur le gain historique. Le rendement immobilier au contraire se calcule immédiatement et est relativement stable si la demande locative est bien présente.

    1. Bonjour Jean,

      Je comprends votre point de vue. Je ne pense pas du tout que l’investissement immobilier soit moins risqué. Pour toutes les stratégies performantes, il faut investir sur le long terme. En bourse, on réduit réellement le risque en investissant sur le long terme, vous avez raison. Pour l’immobilier c’est pareil, ca a bien monté depuis 40 ans mais cela n’a pas toujours été le cas, l’immobilier a perdu 50% dans de nombreux endroits dont Paris. Par ailleurs, je rappelle que le 2e jour de votre achat vous avez perdu 10% de votre investissement (les frais), si vous avez emprunté avec un apport de 20%, vous avez perdu 50% de votre investissement le premier jour. Vous récupérer votre mise sur le long terme.
      Par ailleurs, il me semble clairement moins risqué d’acheter 1600 entreprises dans le monde progressivement tous les mois plutôt que un bien à un seul endroit en une seule fois …

      Cela ne veut pas dire que l’immobilier ne présente pas d’intérêt, bien au contraire.